Le portail à peine franchi, le visiteur voit se dresser devant lui un château médiéval de belle allure, avec ses tours (au nombre de 4 ). Il a été construit au XIIIe siècle par Manassès de Seignelay, évêque d'Orléans.
En effet, Meung est un fief des d'évêques d'Orléans, depuis que Charlemagne au IXe siècle leur confia le monastère Saint Liphard , présent sur place à l'époque. Au début du VIe siècle , Liphard, appartenant à l'entourage de Clovis, avait fondé là un ermitage, à l'origine de cette communauté religieuse. Au XVe siècle, le château sera surélevé d'un étage et un pont levis sera aménagé. Le poète François Villon sera incarcéré dans les geôles du château. Louis XI, qui suit de près la construction de la basilique de Cléry proche, y séjournera fréquemment. En 1461, il fait libérer Villon à la demande de Charles d'Orléans.
Mais après avoir contourné le château, grande est notre surprise de découvrir une façade peinte en rose d'un tout autre aspect: en 1706, l'évêque Fleuriau d'Armenonville, grâce à une aide royale, remanie la façade côté jardin, qui prend l'aspect d' un château classique. Les fossés sont en partie comblés pour laisser place à une cour d'honneur pavée.
La façade XVIIIe vue des jardins.
La grande salle centrale du château médiéval fut détruite pour aménager la cour d'honneur. A la veille de la Révolution, Jarente de La Bruyère, ministre de Louis XV, aménage de superbes appartements, met les jardins au goût du jour, et fait construire une chapelle néoclassique. Plusieurs familles propriétaires se succèderont après la Révolution. Le château sera ouvert au public en 1973. Depuis 2010, les actuels propriétaires mènent des travaux de restauration pour le préserver.
La collégiale Saint Liphard jouxte le château. Et l'on aperçoit un bâtiment médiéval composé de deux tours qui lui est accolé, que l'on appelle "les tours Manassès": il date du XIIe siècle; l'évêque Manassès de Garlande l'avait fait construire à la suite de la rébellion de son vassal Lionnet de Meung qui avait ébranlé son autorité.
LA VISITE INTERIEURE DU CHATEAU :
Comme à Beaugency (1), la visite du château , grâce à de nombreux panneaux pédagogiques, permet d'en apprendre plus sur la vie quotidienne de ses occupants à diverses époques, et c'est parfois étonnant! On découvre aussi au fil de la visite des objets du quotidien très surprenants!
On découvre d'abord l'imposante salle des gardes , avec ses voutes en croisée d'ogives du XIIIe siècle. Via l'antéchapelle, salle de transition vers la chapelle consacrée à Marie, on découvre celle -ci: elle est de style néoclassique (XVIIIe s) et a été construite par l'architecte Louis François Trouard pour l'évêque Jarente de La Bruyère.
La chapelle, vue de l'antichapelle.
Elle est ornée d'une statue de Marie.
Statue de Saint Louis par Delaistre.
Statue de Sainte Thérèse d'Avila, même sculpteur.
On passe ensuite dans la "salle de comédie": on y jouait des pièces spécialement écrites pour les représentations privées. Comédiens professionnels et amateurs y jouaient. Autres distractions d'usage: la musique, et les jeux (tric trac par exemple).
Dans la salle de comédie, quelques instruments de musique d'époque comme ces cithares.
Un rare "tympanon", instrument à cordes très en vogue aux XVIIe-XVIIIe s, que l'on frappait à l'aide de petits marteaux.
Le salon des liqueurs ou fumoir était réservé aux hommes, qui y passaient après le dîner: on s'y servait une liqueur ,on y fumait, tout en assistant aux jeux de cartes.
Le salon des liqueurs ou fumoir.
Ici, un curieux objet: une tasse à moustaches de 1890, époque où la moustache était à la mode. ! Elle fut en usage jusqu'aux années 30.
On passe ensuite au "salon des dames": ces dames y papotent tout en réalisant, pendant les longues soirées, des travaux d'aiguille.
Le salon des dames.
Encore un curieux objet: une vinaigrette : il s'agit d'une petite boîte où, au XVIIIe s, l'on place une éponge imbibée de vinaigre. Les dames le respiraient pour combattre les migraines ou se remettre de leurs "vapeurs".
Il s'agit ici de pinces appelées "saute ruisseau" que les dames, à la fin du XIXe siècle? portaient à le ceinture ou au poignet et dont elles se servaient pour relever leur robe lors du franchissement d'un obstacle ou pour éviter la boue par exemple.
L'escalier Brilhac (XVes).
On découvre ensuite la cuisine médiévale, pièce à croisées d'ogives du XIIIe (à l'origine c'était l'emplacement du pont levis). Puis on passe dans l'herboristerie, où l'on préparait potions et onguents, dans la lingerie, et dans le magasin où l'on stockait tous les objets nécessaires à la vie quotidienne.
La cuisine médiévale.
La lingerie: on y stockait le linge de maison, et on s'y livrait au repassage.
Une armoire bien remplie dans le "magasin".
Toute une série de chambres (chambre du malade, de Madame de Pilles, de Félix Lecoulteux) sont autant ensuite d'occasions de parler de divers aspects de la vie quotidienne de l'aristocratie aux époques correspondantes. Des panneaux informatifs donnent des détails parfois surprenants sur ce sujet.
La chambre du malade.
La chambre de Madame de Pilles (sœur de l'évêque Jarente de La Bruyère). Saignée, purge, épouillage étaient des pratiques quotidiennes du matin.
La chambre de Félix Lecoulteux (XIXes).
On y voit un meuble typiquement masculin, une barbière avec son nécessaire de rasage.
Encore un objet surprenant, l'ancêtre de nos buvards: la boîte à sable ! Pour éponger le surplus d'encre au temps des plumes d'oies, on saupoudrait ses écrits de sable fin.
Petit passage au grenier:
Le grenier, ici, servait à stocker le linge sale et à étendre le linge propre.
La visite de la salle à manger de l'évêque est l'occasion d'en savoir plus sur le rituel du repas chez les gens de condition, celle de la bibliothèque de découvrir la composition au XVIIIe et XIXes d'une bibliothèque digne de ce nom :
La salle à manger est une invention du XVIIIe siècle.
Portrait de l'évêque Jarente de La Bruyère, proche de Choiseul. Exilé quand son protecteur tombe en disgrâce, il voudra faire de Meung un petit Versailles.
Tout château au XVIIIe et XIXe s se doit de posséder une bibliothèque, avec des ouvrages de genres variés.
La visite se poursuit avec la découverte de la grande cuisine, de la salle de bain de l'évêque (aménagement luxueux et rare à cette époque), du "poudrier", ou chambre à poudrer: on poudrait les perruques avec de la farine!
Un coup d'œil à présent aux souterrains du château, qui servaient de prison et comportaient une salle de torture. Ils servaient aussi de refuge pour la population en cas de trouble.
Les souterrains.
On y trouve une belle salle voûtée d'ogives aux chapiteaux ornés de végétaux: elle servait de cellier.
(1) A VOIR aussi notre visite du château de Beaugency: